Depuis longtemps, la question de l’assurance commerciale et des affaires au Québec est plus compliquée que dans le reste du Canada, voir même que dans toute l’Amérique du Nord. Le Code civil requiert une couverture plus large et plus complète que dans les autres régimes juridiques. Le faible nombre d’entreprises œuvrant dans le domaine de l’assurance a aussi toujours eu un impact. Toutefois, la situation n’a jamais été aussi pire qu’aujourd’hui. Au point que la province est entrain de perdre de sa compétitivité face aux juridictions voisines.
État de la situation
Le Québec, en plus de faire bande à part au plan juridique, par son Code civil unique au Canada, a aussi la particularité d’être la seule juridiction de langue française. Historiquement, ceci a toujours limité le nombre de compagnies d’assurance offrant leurs produits au Québec. Ceci, surtout sur le plan des assurances commerciales et d’affaires. Le problème est rendu encore pire en raison de fusions et d’acquisitions récentes en matière d’assurances et par le fait que de plus en plus de documents juridiques doivent être traduits pour pouvoir être valides au Québec.
Jumelé ces deux facteurs à une sortie de pandémie et à une reprise qui met à rude épreuve les petites entreprises et vous avez un cocktail très négatif pour la rentabilité du milieu des affaires du Québec. Qui plus est, le nombre de nouveaux risques à assurer, comme le cyberisque ou le risque contre le vol d’identité, ne cesse de grandir et avec lui, viennent des augmentations de primes prohibitives.
En 2023, il n’est pas rare de voir des factures d’assurance doubler ou même tripler. Dans certains cas, et pour certains types de commerces, il y a désormais des zones de « non-assurabilité » et ce, peu importe le nombre de réclamations passées ou la volonté de payer. Dans bien d’autres cas, un unique assureur est disponible dans un secteur donné. Ça vous donne une idée des primes qui peuvent être chargées.
Les solutions
Les pistes de solutions sont nombreuses, mais pas simples à appliquer. Un délai dans l’application de certaines exigences linguistiques serait la bienvenue. Il est plus long de traduire des dizaines de milliers de pages de documents légaux que de traduire un site web. La règlementation pourrait refléter cette réalité.
Une partie du Code civil pourrait être modifié afin de limiter la responsabilité dans le cas des entreprises ayant plusieurs franchisés ou plusieurs places d’affaires. Une des raisons qui fait que le reste du pays est mieux desservi est justement cette limitation de la couverture de responsabilité. Rien n’empêche le Québec d’agir. Non seulement les primes baisseraient, mais plus de compagnies d’assurances s’impliqueraient au Québec, car le mode de fixation des primes serait simplifié.
Enfin, le gouvernement du Québec, à travers son autorité sur l’AMF, pourrait freiner la couverture additionnelle de certaines formes de nouveaux risques, dont la portée est parfois mal évaluée par le régulateur.
D’ici à ce que la situation de l’assurabilité s’améliore, le gouvernement devrait tenir compte des besoins des entreprises, et les accompagner dans leur défi de trouver une assurance à prix correct. La manière de le faire est de redéfinir le cadre légal et de permettre ainsi une amélioration de l’offre et de permettre aux mécanismes du marché de bien fonctionner.
Lorsqu'une entreprise n'ouvre pas ou ne se développe pas au Québec, cela représente une perte de recettes fiscales potentielles pour le gouvernement. Les revenus des entreprises qui sont consacrés à des primes d'assurance plus élevées que nécessaire ne peuvent pas être imposés ou réinvestis dans la croissance. En atténuant les difficultés des entreprises québécoises en matière d'assurance, le gouvernement pourrait également s'aider lui-même, aider son économie et aider ses citoyens.
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